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Le dépistage précoce de la maladie rénale chronique peut la prévenir ou du moins retarder ses complications

20 mars 2025 l Dr Brigitte Lantz – Secrétaire générale de la Fondation du Rein.

Contexte

Une personne adulte sur dix souffre d’une affection rénale, soit près de 850 millions dans le monde. L’Organisation Mondiale de la Santé prévoit une augmentation de la prévalence de la maladie rénale chronique de 17 % dans les dix  années à venir. Pourtant chaque année, des millions de personnes décèdent prématurément d’insuffisance rénale chronique et des complications cardiovasculaires qui lui sont associées en raison d’un diagnostic tardif. Or, depuis plusieurs années, les maladies rénales, même si elles sont le plus souvent silencieuses, peuvent être détectées et leur évolution ralentie, voire stoppée par des médicaments et des règles hygiéno-diététiques simples.

Pour lutter efficacement contre ce fléau, à l’initiative de patients et de professionnels de santé, de nombreuses fondations dédiées à la lutte contre les maladies rénales ont été créées dans le monde. On en décompte 63 réparties dans 40 pays. Chacune d’elles développe dans son pays des programmes de dépistage, de prévention, de recherche de nouvelles thérapeutiques, d’aide aux patients et d’encouragement à la recherche.

En France, la Fondation du Rein, en partenariat avec les associations de patients et les sociétés savantes, remplit ces missions en assurant la promotion des évènements organisés dans différentes villes par les équipes néphrologiques, à destination de la population et des professionnels de santé. Tous les évènements effectués dans le cadre de la Journée Mondiale du Rein reçoivent chaque année le haut patronage du Président de la République.

Qu’est-ce que la maladie rénale?

La maladie rénale chronique est fréquente, longtemps silencieuse et insidieuse, et de ce fait, souvent diagnostiquée et prise en charge trop tardivement. Ce retard au diagnostic est à l’origine d’une perte de chance avec comme conséquences une détérioration de la fonction rénale pouvant conduire à la nécessité d’un traitement de suppléance, par dialyse ou par greffe rénale avec son lot de morbi-mortalité, de souffrances physiques et psychologiques et d’un coût non négligeable pour la collectivité.

Si la dégradation de la fonction rénale est un processus naturel du vieillissement estimé à environ 1 % par an à partir de l’âge de 50 ans, le vieillissement ne conduit pas à lui seul au développement d’une maladie rénale chronique. Des facteurs de risque cardiovasculaire que sont l’hypertension artérielle, le diabète ou l’obésité peuvent accélérer ce processus. Il est donc primordial de dépister la maladie rénale chez les populations à risque, d’autant plus que la moitié des mises en dialyse sont dues au diabète ou à l’hypertension artérielle, et que l’obésité est une cause majeure de diabète non-insulinodépendant.

Les recommandations de la Haute autorité en santé (HAS) recommandent également ce dépistage au-delà de ce cadre, notamment pour les patients ayant eu des traitements néphrotoxiques antérieurs, une exposition aux produits de contraste iodés ou à des toxiques professionnels).

La maladie rénale chronique étant une maladie silencieuse, les patients qui en sont atteints n’ont aucun symptôme avant le stade avancé de la maladie. C’est la raison pour laquelle le dépistage est clé pour éviter une découverte trop tardive de la maladie empêchant de mettre en place une prise en charge adéquate qui aurait pu permettre de ralentir sa progression.

Rappelons que tous les ans, près d’un tiers des patients nouvellement dialysés doivent commencer ce traitement en urgence. Cette situation, plus fréquente en cas de suivi néphrologique tardif, insuffisant, voire absent, est source d’hospitalisations évitables et d’une altération de la qualité de vie pour les patients dont le projet thérapeutique n’a pas pu être discuté en amont avec leur néphrologue.

D’après le registre nationale REIN, le pronostic vital à 5 ans des patients traités par dialyse ou transplantation rénale est de 50 % de mortalité, soit le même que celui d’un cancer du colon métastatique.

Comment effectuer ce dépistage ?

Le dépistage doit associer une estimation du débit de filtration glomérulaire (DFG) estimée par la formule CKD-EPI, par mesure du taux de créatinine plasmatique, une mesure de l’albumine dans les urines rapportée à ce taux sur un échantillon urinaire (ratio albuminurie/créatininurie).

Rappelons que l’Académie nationale de Pharmacie a recommandé d’effectuer systématiquement ces dosages chez tout patient présentant des facteurs de risque et que la valeur du DFG figure sur toute ordonnance, afin que le pharmacien puisse vérifier l’adéquation de la posologie des médicaments prescrits éliminés par voie rénale.

Malgré cette recommandation, les pratiques de dépistage de la maladie rénale chronique dans les populations à risque restent notoirement insuffisantes. C’est d’autant plus important de la dépister que certains médicaments ou produits néphrotoxiques sont à éviter chez ces personnes, dont beaucoup ignorent qu’elles ont déjà une atteinte rénale.

A côté d’autres acteurs et avec le soutien de la communauté médicale et des associations de patients, l’Assurance maladie participe également à des campagnes de promotion du dépistage de la maladie rénale chronique, afin de rappeler aux médecins généralistes et aux autres professionnels de santé l’ensemble des indications de son dépistage. Elle dispose d’outils permettant de cibler cette campagne, en prenant appui sur la consommation médicamenteuse des assurés sociaux par exemple.

Évolution de la maladie rénale chronique

L’évolution de la maladie rénale chronique n’est pas irrémédiable mais peut être ralentie, voire stabilisée, grâce à une prise en charge adaptée, notamment avec l’arrivée sur le marché de nouvelles classes de médicaments néphroprotecteurs, dont le bénéfice s’additionne à celui des inhibiteurs du systèmes rénine-angiotensine et aux mesures hygiéno-diététique (réduction des apports en protide et en sel, activité physique adaptées).

En effet, des médicaments susceptibles de freiner les mécanismes de dégradation de la fonction rénale sont apparus ces dernières décennies permettant d’éviter la dialyse et ce, avec un niveau de preuve élevé constaté par des essais cliniques convergents, comme l’a souligné récemment l’Académie nationale de Médecine.

Ce progrès thérapeutique change la donne et inaugure une nouvelle époque ou le nombre de nouveaux patients nécessitant la dialyse ou la greffe pourrait fortement diminuer.

Selon l’Agence de la biomédecine, le nombre total de nouveaux patients arrivant au stade de la dialyse a augmenté de +2,6 % par an entre 2012 et 2017 alors qu’il a diminué, pour la première fois, de -0,6 % par an entre 2017 et 2022. Formons le vœu que cette tendance se confirme dans l’avenir.

Conclusion

La Fondation du Rein lance un appel à l’occasion du colloque qu’elle organise à l’Académie nationale de médecine le 13 mars 2025 dans le cadre de la Journée Mondiale du Rein, afin qu’un plan gouvernemental sur la maladie rénale chronique soit réalisé prenant en charge de façon holistique cette pathologie à l’instar de ce qui a été effectué pour le plan Cancer.

Outre la prévention des maladies rénales, il est essentiel de renforcer la recherche fondamentale, clinique et appliquée grâce a des initiatives publiques, mais aussi privées, dans un cadre caritatif.

Faisons des maladies rénales un enjeu national !

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